La sécurité sociale vise à garantir une existence décente à toutes et tous, chacun participant à son financement selon ses moyens. L’entraide mutuelle ainsi institutionnalisée vise à préserver les individus contre les risques de l’existence. Ce modèle historique doit être défendu et renforcé dans son caractère démocratique et universel : il est au cœur de notre modèle social depuis l’ordonnance du 9 octobre 1945.
Afin de la préserver, il convient d’adapter la sécurité sociale aux défis de notre temps. La sécurité sociale pourra-t-elle protéger les individus des bouleversements environnementaux présents et futurs ? Quelle place peut prendre la Sécurité sociale dans la prévention et l’atténuation de ces risques ?
C’est cette interrogation qui a présidé à la création de cette mission d’information, à l’initiative du groupe GEST et de sa rapportrice Mélanie Vogel. Nous remercions le Président Guillaume Chevrollier et l’ensemble des membres de la mission d’information pour leur travail. Les constats figurant dans ce rapport sont une base de réflexion solide afin de changer de paradigme : la défense de l’environnement et de la santé humaine ne peuvent plus être considérés séparément.
Toutefois, nous proposons un ensemble de recommandations plus ambitieuses et structurantes que celles présentées dans le rapport. Ces mesures s’appuient sur les constats présentés en auditions, dont il faut souligner le caractère largement consensuel. La majorité sénatoriale partage en effet toujours les constats posés en audition, mais ne semble plus vouloir prendre acte des transformations qu’ils supposent.. En dépit de positions divergentes, un accord a été trouvé sur l’essentiel, notre groupe estime qu’il aurait pu être bien plus ambitieux.
La sécurité sociale écologiste est un moyen de s’interroger sur notre modèle de société afin de la rendre durable et résiliente.
C’est dans cette optique que nous présentons les orientations suivantes :
Pour relever les défis climatiques du XXIe siècle, la création d’une nouvelle branche de sécurité sociale dédiée à la couverture des risques environnementaux est une solution majeure. Cette 6ème branche pourrait couvrir le remboursement aux cinq autres branches des dépenses effectuées au titre du risque social qu’elles couvrent et identifiées comme étant liées au dérèglement climatique, à savoir :
- Le financement des dépenses de prévention des risques naturels ;
- L’intervention publique en matière d’assurance récolte ;
- La couverture des risques environnementaux devenus non assurables par les organismes privés ;
- La compensation des conséquences du changement climatique sur les revenus des ménages les moins aisés ;
- Le financement de l’accompagnement des mutations professionnelles.
Nous sommes attachés à ce que le modèle de gouvernance de cette branche soit pluraliste, démocratique et décentralisé. Nous proposons que soit partie prenante à sa gouvernance les acteurs du social, de l’économie et de l’environnement ainsi que des citoyens tirés au sort. Les financements peuvent être multiples : les économies considérables pouvant être générées par l’assurance maladie du fait de la transition d’un système curatif vers un système préventif, l’affectation du produit de la fiscalité environnementale ou des ressources dédiées au remboursement de la dette sociale une fois celle‑ci éteinte, ou encore une contribution des ménages, proportionnelle à leur empreinte environnementale et à leurs revenus et patrimoines, et des organismes d’assurance.

Rendre effectif le droit à l’alimentation saine doit être un objectif prioritaire : nous défendons le financement par cette nouvelle branche d’une allocation alimentaire universelle de 150 euros par mois et par individu. La crise de la Covid-19 a aggravé une situation d’urgence, plus de 8 millions de personnes en France sont en situation d’insécurité alimentaire, et plus de 5,5 millions sont des bénéficiaires réguliers de l’aide alimentaire. Cette allocation permettrait notamment à celles et ceux d’entre nous qui sont les plus précaires d’avoir un accès facilité à une alimentation de qualité, de mieux rémunérer les paysannes et les paysans, d’accélérer et de faciliter la transition du monde agricole en limitant les pesticides et les perturbateurs endocriniens. Les politiques alimentaires doivent être territorialisées et décentralisées. Enfin, nous proposons la création d’une compétence « alimentation » ou d’un « chef de filât » en matière de lutte contre la précarité alimentaire pour une catégorie de collectivité territoriale à définir.